Le Matin Dimanche vom 27.02.2011
FOOTBALL Les équipes juniors du FCB trustent les titres nationaux
Granit Xhaka, 18 ans, est le nouveau joyau du FC Bâle. Après tant d’autres.
Dimanche dernier, lors de la victoire du FC Bâle contre Sion, Granit Xhaka (18 ans) a été désigné meilleur homme sur le terrain. C’est lui qui a adressé la passe de but à Xherdan Shaqiri (19 ans). Sur le terrain, il y avait un autre jeune issu du centre de formation du FC Bâle, Valentin Stocker (21 ans).
Les noms de Stocker et Shaqiri sont déjà bien connus du grand public. Si jeunes, ils sont déjà des titulaires indiscutables au FC Bâle, mais aussi en équipe de Suisse. Champion du monde en 2009 avec les M17, formé depuis tout petit au club, Granit Xhaka est le «nächste Juwel», le «nouveau joyau», comme l’écrit la presse alémanique. Le dernier à avoir été introduit en première équipe.
«Il a une grande aisance technique, une vision du jeu au-dessus de la moyenne. Il est en train de se faire sa place. Il est promis à un très grand avenir», souligne le Jurassien Michel Kohler, ex-entraîneur de Concordia, aujourd’hui directeur technique du centre de formation rhénan.
D’autres talents lancés très jeunes au plus haut niveau par le FC Bâle réussissent aujourd’hui une belle carrière à l’étranger: Kuzmanovic à Stuttgart, Rakitic à Séville, Derdiyok à Leverkusen. A Bâle, on ne se contente pas, comme à Sion par exemple, de miser sur des joueurs étrangers de seconde zone. La politique du club est de jouer la carte des forces vives, de donner leur chance aux plus grands talents formés au club.
L’investissement dans le centre de formation doit porter ses fruits. C’était déjà le cas sous l’ère de Christian Gross, ça le reste avec Thorsten Fink, entraîneur actuel.
«C’est la volonté de notre présidente Gigi Oeri, souligne Michel Kohler. Ici, les jeunes sentent que c’est possible, qu’il y a une ouverture, comme on le voit avec Xhaka. Pour la motivation, c’est très important, même si au final, il y aura peu d’élus. On ne va pas sortir trois nouveaux jeunes par saison en Super League. »
«Formidable enthousiasme»
Stocker a fait ses débuts avec la une en 2008 à Thoune, à 18 ans. Shaqiri, au même âge, a débuté en juillet 2009. «Fink lui avait demandé de participer en juin à un camp d’entraînement à Saint-Moritz. Au retour, il m’a dit: «Je le garde», c’était décidé, raconte Michel Kohler. Le point commun de ces jeunes est qu’ils osent, qu’ils ne font pas de complexe même quand ils se retrouvent aux côtés de stars comme Frei ou Streller. Culottés, mais sans arrogance. Meilleur exemple: Shaqiri, avec son mental de fer, qui, balle au pied, ne cesse de provoquer l’adversaire. »
«Bâle possède les meilleures équipes du pays dans pratiquement toutes les catégories juniors, souligne Claude Ryf, entraîneur de l’équipe suisse des M19. On sent quand on assiste aux entraînements un formidable enthousiasme. »
Cinq joueurs du FC Bâle figuraient parmi les champions du monde M17. Ils sont le même nombre aujourd’hui, dont quatre Romands qui, si jeunes, ont déjà rejoint Bâle. «Bien sûr, c’est actuellement le club de prestige où tous les gamins rêvent de jouer. Mais il y a un risque d’encombrement. D’autres clubs font du très bon travail avec les jeunes, comme le FC Zürich, par exemple, qui a sorti Koch ou Schönbächler», poursuit Claude Ryf.
Le Valaisan Thibault Constantin, ex-junior du FC Sion, 16 ans, est l’un des quatre Romands des M17 évoluant au bord du Rhin. Excellent buteur, il a accepté l’offre voilà une année et demie, avec le soutien de Mario, son papa, quitte à s’éloigner si jeune (à 14 ans et demi!) de sa famille.
«A Sion, on me promettait monts et merveilles, que je serais le nouvel Emile Mpenza. Mais, ces dernières années, pas un jeune n’a eu vraiment sa chance. A Bâle, c’est complètement différent. Un de mes copains, Sandro Wieser, qui a une année de plus que moi, a été intégré cette saison dans le contingent de la une. Ça motive. »
Thibault vit, avec une vingtaine d’autres «exilés» âgés de 13 à 18 ans, dans un immeuble près du stade, où tout est fait pour combler les besoins. «J’ai ma chambre à moi. En plus des entraînements, je suis des cours d’anglais, d’allemand, d’informatique. J’adore cette vie. »
Un nouveau campus
Son papa, très fier, suit tous ses matches. «Je connais la route Sion-Bâle, rigole-t-il. Mon fils est très heureux là-bas. La saison dernière, Thibault avait mis deux des trois buts qui avaient permis à Bâle de battre… Sion en finale suisse des M18. C’était un joli clin d’œil. »
Avec 220 juniors répartis en 13 équipes, le centre de formation du FC Bâle est une véritable petite entreprise. «Quelque cinquante personnes y travaillent. Dix à plein temps, dont huit entraîneurs, explique Michel Kohler. D’ici deux ans et demi, on déménagera dans un véritable campus, dont la première pierre va être posée tout prochainement. »
Le recrutement se fait de manière différente, selon les âges. «Chez les tout jeunes, les 10-12 ans, ce sont les clubs de la région qui, jouant parfaitement le jeu, nous signalent spontanément leurs talents. D’Augst, Shaqiri est, par exemple, venu chez nous à 10 ans. A partir des M15, nous étendons notre champ de recrutement à toute la Suisse. »
Une offre du FC Bâle se refuse rarement. De Kriens, Stocker a rejoint le club à 16 ans. «Devenir professionnel était un rêve. Mais il n’est devenu concret que lorsque je suis arrivé à Bâle en 2006. »
Une formation pour tous
«Jusqu’à l’âge de 18 ans, scolarité ou apprentissage, tous les jeunes du FC Bâle exercent une activité en dehors du foot, précise Michel Kohler. En ce moment, Xhaka finit son apprentissage d’employé de commerce, Shaqiri, avant de signer son premier contrat pro, travaillait comme vendeur chez Globus. »
Miser sur la formation peut aussi se révéler un excellent investissement. En 2009, le transfert de Derdiyok au Bayer Leverkusen a rapporté quelque 5 millions au club bâlois. Convoités par plusieurs grands clubs européens, Shaqiri et Stocker, eux, ont préféré, pour l’heure, poursuivre leur carrière au FC Bâle.
Choix judicieux selon Michel Kohler. «Pour un jeune, mieux vaut arriver par la grande porte quand on débarque à l’étranger. Shaqiri sera dans ce cas quand il décidera de partir: il a déjà brillé en Ligue des champions et avec l’équipe de Suisse. Le FC Bâle reste la vitrine idéale pour un talent», conclut Michel Kohler.