Presseschau

Le Matin vom 01.12.2002

Un ballon, des Mancuniens, des sushis

Mardi dernier, parmi les 30 000 spectateurs du Parc Saint-Jacques, il y en avait un millier de privilégiés. Visite chez les VIP

Michel Busset
Bâle
1er novembre 2002

A main gauche, comme aurait dit Squibbs aux temps héroïques des retransmissions radiophoniques, des alignements de saumon fumé, de la salade de museau, des huîtres comme s’il en pleuvait, du rôti de bœuf, bien d’autres choses alléchantes encore. A main droite, la pelouse de Saint-Jacques, peignée comme un communiant, prête à accueillir les vedettes locales et d’autres, à la célébrité presque universelle, venues d’outre-Manche, Fabien Barthez en tête. Au milieu, un chariot gavé de havanes qui peine à se tracer un chemin au milieu d’un petit millier de convives dont certains ne sont pas tout à fait anonymes. N’y repère-t-on pas, par exemple, la silhouette discrète d’un certain Köbi Kuhn?

La vie est ainsi faite, depuis la nuit des temps. Pour les 30 000 spectateurs qui étaient mardi dernier à Saint-Jacques, dans l’espoir, longtemps entretenu, d’un exploit historique, la soirée n’a pas forcément commencé par un sandwich avalé à la hâte dans le froid cru des couloirs du stade. Il y a des voyageurs de première classe et de classe économique. Il y a, aussi, dans les stades de football, comme à Roland-Garros ou sur les circuits de formule 1, des spectateurs privilégiés. Ne le répétez pas, mais, le plus souvent, leurs billets leur ont même été offerts...

Un contact plus chaleureux
Il n’y a pas si longtemps encore, les relations d’affaires s’entretenaient à la table des meilleurs restaurants. Mais les modes changent. Dans les grandes sociétés, les responsables du marketing préfèrent maintenant associer ces rendez-vous incontournables, pour tisser des liens ou les entretenir, avec ce qu’ils appellent des «événements». Comme un match de la Ligue des champions, par exemple. Le contact est plus chaleureux, il y a quelque chose à partager, en plus des plats d’huîtres. Cerise sur le gâteau, il n’est même pas besoin de parler affaires et contrats. La règle tacite voudrait même qu’on évite soigneusement le sujet.

Le FC Bâle et les concepteurs du Parc Saint-Jacques ont bien compris que si le football, sport qui ne laisse pas grand monde indifférent, se prête mieux que d’autres encore à l’organisation de tels «événements», il était indispensable de leur réserver un écrin de choix.

Plus haut, de vrais salons...
Le dernier étage de la tribune est composé d’une succession de salons loués pour l’occasion par un certain nombre de grandes entreprises. Il y en a treize, qui peuvent accueillir une quinzaine de personnes chacun. Ces salons dominent littéralement la pelouse et les VIP peuvent assister au match derrière une grande baie vitrée, à l’abri du froid, mais isolés, aussi, de l’ambiance des tribunes. La vision est en revanche idéale pour apprécier l’organisation tactique de chaque équipe.

Le tarif: 12 000 francs

pour l’année régulière
A l’étage directement inférieur, qui ressemble à une immense salle de restaurant, pas moins de 900 personnes peuvent se sustenter avant le match, se réchauffer un peu pendant la mi-temps et se retrouver, pour refaire l’histoire, après le coup de sifflet final. Les moins pressés de quitter les lieux pourront même croiser les joueurs du FC Bâle...

La restauration est de grande qualité et le bar à sushis ne cesse d’étonner ceux qui le découvrent. Lesdits sushis circulent sur des petits bateaux qui font le tour du bar: il n’y a qu’à se servir! Le tout, pour dire vrai, est à la hauteur des prix pratiqués. Ils n’atteignent pas, à ce que l’on sait, les tarifs «ecclestoniens» du Paddock Club des circuits de F1. Mais le ticket pour deux personnes, qui comprend également deux sièges dans la tribune et une place dans le parking du stade, est facturé 12 000 francs l’année civile. Pour la saison régulière uniquement, hors Ligue des champions... Mais les havanes sont compris.


«Une approche différente des contacts, plus relax...»

Le constructeur automobile Toyota figure parmi les (nombreuses) entreprises qui mettent à profit les matches du FC Bâle pour organiser des «événements» au Parc Saint-Jacques. Normal, puisqu’il s’agit du sponsor maillots, donc parmi les plus importants, du club rhénan.

«Que ce soit dans le cadre du championnat de Suisse, ou dans celui, plus huppé, de la Ligue des champions, nous invitons une dizaine de personnes à chaque match au titre de VIP, nous a dit M. Oswald Kron (photo), le managing director de Toyota Suisse. Principalement des concessionnaires de la marque et quelques-uns de nos bons clients. En plus, nous mettons une quarantaine de billets à disposition de nos représentants de la région bâloise, qui les distribuent à leur propre clientèle. Inutile de dire que nous ployons sous les demandes... Pour nous, c’est une occasion formidable de soigner les contacts dans une ambiance très différente, plus décontractée, que celle des traditionnels dîners d’affaires. Tout le monde est relax, nos invités comme nous-mêmes.»

Le contrat de sponsoring entre le FCB et Toyota court jusqu’en juin 2004. «Ce contrat n’a pas été signé par Toyota Suisse, mais par Toyota Motor Corporation, au Japon, ajoute M. Kron. C’est M. Jäggi, l’ancien président du FCB, aujourd’hui à Kaiserslautern, qui en a été l’initiateur. En sa qualité de grand patron d’Adidas, il avait en effet eu de nombreux contacts avec les hauts dirigeants de Toyota à l’occasion des Jeux de Nagano, et il les a recontactés à l’heure de chercher des partenaires pour son club de football. Le contrat porte sur 4 millions de francs pour une période de trois ans et demi.» Sera-t-il reconduit en juin 2004? «Nous n’en sommes pas encore au stade des négociations, mais il est clair que Toyota Suisse ne sera pas en mesure, sans soutien de la part du Japon, d’assurer un tel montant. Ce sont des souliers trop grands pour nous...»

M. Kron n’en espère pas moins que ce partenariat pourra perdurer: «On ne peut pas savoir quelles sont les retombées exactes d’une telle association en termes de ventes de voitures. Ce qui est certain, en revanche, c’est qu’elle génère un incontestable courant de sympathie autour de notre marque. On le perçoit aux nombreuses lettres que nous recevons. A terme, ça ne peut être que bénéfique.»
Propos recueillis par M. Bt

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